Évitement de l'impôt sur les sociétés

Base Erosion, Profit Shifting and Developing Countries


Document de travail d'Ernesto Crivelli, Ruud De Mooij et Michael Keen publié par le FMI en 2015.

Résumé

Crivelli et al. évaluent dans quelle mesure les pays en développement sont affectés par l’érosion de la base d’imposition des sociétés, le transfert de bénéfices et la concurrence fiscale. Dans différentes analyses de régression, ils testent si l’assiette de l’impôt sur les sociétés d’un pays réagit aux changements des taux d’impôt sur les sociétés (IS) nationaux et étrangers. Ils constatent qu’une augmentation des taux d’IS d’un pays a un effet négatif sur l’assiette fiscale de ce pays. De même, ils constatent que les diminutions des taux d’IS étrangers ont également un effet négatif sur l’assiette fiscale d’un pays. Ils qualifient cet effet de “débordement de la base”, car la base fiscale du pays réagit aux changements de la politique fiscale étrangère.

Soutenant que les débordements de base peuvent être causés par les flux de capitaux réels mais aussi par le transfert de bénéfices, ils montrent que les changements des taux d’imposition des paradis fiscaux ont un effet négatif important sur la base d’imposition des sociétés, qu’ils attribuent aux activités de transfert de bénéfices. Les auteurs constatent que les pays non membres de l’OCDE sont affectés par les débordements de la base dans une mesure similaire à celle des pays de l’OCDE, voire plus. Cependant, les canaux de débordement diffèrent entre les deux : alors que les flux de capitaux réels semblent dominer pour les pays de l’OCDE, le transfert de bénéfices semble dominer les effets de débordement pour les pays non-OCDE. En termes de pertes de recettes fiscales estimées, les pays de l’OCDE perdent des montants absolus plus importants, mais les pays en développement semblent plus gravement touchés par rapport à leur PIB. En outre, Crivelli et al. constatent que les pays réagissent aux réductions des taux d’imposition à l’étranger en réduisant leur propre taux d’imposition, ce que les auteurs appellent les “retombées stratégiques”. Ils montrent que cet effet est particulièrement fort parmi les membres de l’OCDE.

Principaux résultats

  • Les résultats suggèrent que l’érosion de l’assiette de l’impôt sur les sociétés, le transfert de bénéfices et la concurrence fiscale sont aussi préoccupants pour les pays en développement que pour les pays de l’OCDE.
  • Le transfert de bénéfices semble dominer les retombées de l’assiette pour les pays en développement plutôt que les décisions d’investissement réel.
  • Par rapport au PIB, les pertes de recettes fiscales sont plus importantes pour les pays non membres de l’OCDE que pour les membres de l’OCDE, s’élevant respectivement à 1% et 1,3% du PIB.
  • Les auteurs soulignent toutefois le caractère provisoire de leurs estimations.
  • Les pays réagissent aux réductions des taux d’imposition dans les autres pays en réduisant leurs propres taux d’imposition. Cette réaction est particulièrement forte parmi les pays de l’OCDE, puisqu’une réduction d’un point de pourcentage du taux moyen d’imposition à l’étranger est associée à une réduction d’un point de pourcentage du taux national.

Implications politiques

Ce document souligne l’importance de l’érosion de la base d’imposition, du transfert de bénéfices et de la concurrence fiscale pour les pays en développement et met ainsi en évidence leur intérêt dans les débats politiques sur les réformes fiscales internationales.

Données

Les auteurs s’appuient sur des données de panel au niveau des comtés couvrant 173 juridictions de 1980 à 2013. Les recettes de l’impôt sur le revenu des sociétés et les taux légaux sont tirés de la base de données du département des affaires fiscales du FMI, avec une couverture complète des pays mais non équilibrée en termes de couverture annuelle. Leur définition des paradis fiscaux suit la liste de Gravelle (2013). Les pays sont également classés en tant qu’OCDE ou non-OCDE, en fonction de leur appartenance (ou non) à l’OCDE à la fin de la période d’échantillonnage.

Méthodologie

Les auteurs estiment plusieurs modèles de régression. Pour l’analyse des débordements de base, ils estiment la semi-élasticité de la base fiscale par rapport aux taux d’imposition étrangers moyens pondérés. Pour l’analyse des débordements de taux stratégiques, ils utilisent le taux d’IS local comme variable dépendante.

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Le document de travail peut être téléchargé sur le site du FMI.